La contribution de GRENE sur l’eau dans le Grésivaudan
Incidence environnementale
A travers tout le territoire se pose la question de l’utilisation de l’eau et de sa répartition.
Sur le Grésivaudan les entreprises STMICROELECTRONICS et SOITEC se développent et sont les plus gros consommateurs.
Après un début d’année qui présente déjà des sécheresses avec des nappes phréatiques au plus bas niveau dans beaucoup de régions, le souvenir d’une année 2022 sèche et très chaude, les habitants du Grésivaudan s’inquiètent.
Le développement des sociétés STMICROELECTRONICS sur Crolles et SOITEC sur Bernin avec leur énorme consommation d’eau renforce cette inquiétude.
A GRENE, nous sommes également inquiets de cette demande d’eau de plus en plus forte et dans l’attente d’une réaction de nos élus à la hauteur des enjeux.
Information de la population :
Nous attendons d’abord un minimum d’informations, alors que les élus contactés disent ne pas comprendre nos inquiétudes. Nous avons demandé une entrevue avec le responsable de l’eau de la communauté de communes, et nous attendons la réponse depuis deux mois.
L’information se fait donc par d’autres canaux, comme :
- « Postillon» qui traite des problèmes de pollution dans la région grenobloise.
- « Stop micro» collectif créé l’été dernier lutte contre l’accaparement des ressources et les nuisances causées par les industries locales, en particulier celles de la microélectronique. Stop Micro a notamment organisé une manifestation de Brignoud à Crolles le 3 avril, rassemblant 800 personnes selon la gendarmerie. De nombreuses associations étaient représentées.
- La revue en ligne « Reporterre» a écrit un document sur le problème de l’eau dans la région grenobloise.
Parlons un peu chiffres :
ST Microélectronics :
-
- ST emploie près de 5000 personnes et compte en recruter 1000 de plus après l’extension
- La consomation d’eau de ST :
En 2021 (le rapport 2022 n’est pas encore paru) ST a consommé 4,2 millions de m3 d’eau (soit environ 500 m3/h) avec un recyclage de seulement 28% (chiffres ST). Actuellement la capacité de distribution d’eau est de 620 m3/h et devrait passer à 800m3/h cet été. - En 2022, ST a présenté un projet d’extension (pour un coût de l’ordre de 5,7 milliards d’euros dont 2,3 payés par l’état) pour construire six nouveaux bâtiments de production (en supplément des trois existants) permettant d’augmenter notoirement sa production. A cela s’ajoutent de nouvelles installations annexes pour le fonctionnement général du site : plateformes de stockage et distribution des différents gaz, une station de traitement des liquides, et des installations de traitement des effluents gazeux.
- Dans sa future structure, ST devrait consommer entre 1200 et 1400 m3 /h soit plus de 10 millions de m3/an, ce qui correspond à la consommation d’eau de 228000 habitants (soit plus de deux fois la population du Grésivaudan).
- L’approvisionnement en eau :
L’eau utilisée par ces industries est fournie par la communauté de communes qui est elle-même alimentée par l’«eau de Grenoble Alpes » et provient des champs captants de la Romanche.
« Eau De Grenoble » pourra-t-elle fournir une telle quantité d’eau, représentant la moitié de la consommation de l’agglo grenobloise ?
En mars 2022, la DREAL (Direction Régionale de l’Environnement de l’aménagement et du Logement) a permis deux forages dans la nappe au droit de l’usine, qui permettront de pomper chacun 150 m3/h. La communauté de communes n’est pas capable actuellement de fournir une telle quantité d’eau et devra faire de gros investissements, une conduite permettant plus du doublement du débit est en cours de construction (8,5 M€).
La Mission Régionale d’Autorité Environnementale (MRAE), a émis en février un avis très critique sur ce projet d’extension, citant :
- La consommation d’eau très importante (eau potable et eau de la nappe phréatique).
- L’impact des effluents aqueux sur les eaux de surface.
- La non prise en compte de la qualité de l’air et du cadre de vie des habitants.
- La non prise en compte du changement climatique et des émissions de gaz à effet de serre.
- La non prise en compte des effets cumulatifs avec le site voisin de SOITEC.
Pour la MRAE, le dossier présente de nombreuses lacunes qui rendent difficile la compréhension du projet.
Voir le rapport de la MRAE : https://www.mrae.developpement-durable.gouv.fr/IMG/pdf/2023apara23_icpe_indstcrolles_38.pdf
Déclaration environnementale 2021 de ST :ite https://www.st.com/content/ccc/resource/corporate/company_promotion/site_brochure/group0/8e/01/30/41/7f/46/4c/9f/EMAS_Declaration_Crolles_2021/files/Crolles_EMAS_declaration_2021.pdf/_jcr_content/translations/en.Crolles_EMAS_declaration_2021.pdf
SOITEC :
Cette société fabrique également des circuits intégrés avec sa propre technologie et emploie à ce jour environ 1 100 salariés. Elle prévoit d’augmenter le nombre d’emplois sur site jusqu’à 1 700 après son extension. Elle est en forte extension, onze hectares de terrain sont prévus pour cela ainsi que pour les industries connexes sur la commune de Bernin.
- Sa consommation d’eau actuelle est d’un peu plus qu’un million de m3/an.
Recyclage de l’eau :
Pour l’instant, il y a de l’eau (le débit de l’Isère est de 50 m3/s à l’étiage) mais le réchauffement climatique, la fonte des glaciers qui progresse rapidement devrait nous inciter à la prudence, des problèmes (y compris pour ces industriels) pourraient rapidement survenir.
Un recyclage plus important de l’eau doit être fait.
Entourée par la mer, la cité-État de Singapour n’a pas de nappe phréatique exploitable, elle est confrontée à une absence massive d’eau potable. Peuplée de 5,7 millions d’habitants, la ville a mis au point un système de recyclage : l’eau des égouts qui fournit 40 % des besoins actuels en eau potable…
A Taiwan, TSMC qui est le plus gros fabricant de circuits intégrés mondial consomme 150000 m3 d’eau par jour, a pour projet d’en recycler 67 000 m3 en 2024 soit 50% de sa consommation.
Alors que les solutions technologiques sont disponibles, nous considérons que cette industrie doit recycler la plus grande partie de l’eau dont elle a besoin, continuer à améliorer les rendements de production et rendre cette eau dépolluée avant son rejet dans l’environnement.
Problème de pollution !
Outre leurs énormes consommations d’eau, ces entreprises consomment une quantité de produits chimiques très toxiques. Ainsi ST consomme autour de 20000 Tonnes de produits chimiques par an et non des moindres : acide fluorhydrique, sulfurique, de l’ammoniaque, des métaux lourds, de l’arsenic…
Les résidus de tous ces produits se retrouvent pour certains dans les rejets aqueux et aériens de l’usine, malgré les installations de traitement. Il est à signaler que ST a signé des accords d’autosurveillance.
Des décrets préfectoraux, régissant les rejets dans l’Isère, semblent très permissifs (par exemple : 150 kg de matières en suspension, 150 kg de fluorures… par jour) mais sans prendre en compte les rejets des autres industries.
L’utilisation de tous ces produits toxiques fait que ces deux entreprises sont classées Seveso (niveau haut pour ST).
Autres problèmes liés aux extensions de ces sociétés :
Ces entreprises en pleine expansion favorisent l’arrivée de nouvelles personnes ce qui entraîne la croissance de l’immobilier et le prix du logement, la perte de terrains agricoles, l’augmentation de la circulation y compris de produits hautement toxiques.
Conclusion :
Nous ne sommes pas contre cette industrie pour des raisons évidentes d’autonomie industrielle. Sans doute est-il souhaitable que les circuits que nous utilisons soient produits ici plutôt qu’en Asie, où de plus les conditions sont moins respectueuses des hommes et de la nature.
Pour assurer chez nous ces conditions, nous souhaitons de l’information, des débats, et concrètement une amélioration substantielle du recyclage de l’eau, comme de la qualité des rejets résiduels dans l’eau comme dans l’air.
On peut se poser la question de savoir si de telles structures ne pourraient-t-elles pas être installées sur plusieurs sites pour en diminuer l’impact ?
Nous ne doutons pas que ces industries stratégiques, accueillies sur notre territoire investiront les moyens nécessaires à sa bonne conservation, dans leur souci proclamé de durabilité économique, écologique et sociale.